27. November 2011
Rebecca Bournigault et Jean-Baptiste Ganne: «DU DÉSERT ET DES OASIS»
Exposition CAN Neuchâtel, jusqu'au 22 décembre 2011
Image: «DSC00070-1 (mb-archives)», 2011
Le CAN invite Rebecca Bournigault et Jean-Baptiste Ganne à présenter pour la
première fois leur travail dans une exposition commune, ou plus précisément,
dans un contexte d’exposition partagé. A cette occasion, ils proposent
chacun(e) une installation inédite ainsi qu’un corpus d’œuvres à réinterpréter
in situ: «Les émeutiers», de Rebecca Bournigault, portraits
extraits de photographies de presse qu’elle peint ici à même les murs
et «Les graffitis» de Jean-Baptiste Ganne, phrases trouvées
sur les murs de la ville, qu’il reproduit en résonance avec le contexte de
l’exposition.
Rebecca Bournigault et Jean-baptiste Ganne s’intéressent tous deux au politique
en tant qu’espace intermédiaire, espace de relation qui s’inscrit à la fois
dans l’intime et le collectif. Ils en décrivent les zones de troubles, de
tensions et mettent en lumière leurs rapports contradictoires au pouvoir
coercitif des institutions sociales.
Chez Rebecca Bournigault, le rapport à autrui est au centre du politique. Dans
ses vidéos, elle met en place un dispositif pour capter un rapport construit
avec l’autre, dans une relation à l’intime et à la représentation. Dans la
vidéo «Saliva» par exemple, elle donne à voir la violence
d’un rapport d’altérité entre trois personnages, dont l’un reçoit les crachats
des deux autres au visage. Elle évoque ainsi avec puissance des rapports de
domination et de soumission et inclut le regardeur dans cette machination.
Jean-Baptiste Ganne entretient lui aussi un lien critique et sentimental au
politique. Il définit son rapport à l’art et à l’autre avec une poétique de la
distance: «l’art, c’est un espace entre toi et moi, un écran de
fumée». C’est dans cet entre-deux qu’il interroge la représentation du
politique et les notions d’altérité et de singularité. Dans son
installation «El Ingenioso Hidalgo Don Quijote de la Mancha», il
a fait traduire en morse le célèbre roman de Cervantès**. Celui-ci fut ensuite
retranscrit en impulsions lumineuses par l’ampoule de son atelier pendant 54
jours (durée de sa lecture intégrale par un ordinateur). L’œuvre se perçoit
donc depuis la rue. Elle fonctionne comme un signe d’alerte à la fois anodin et
inquiétant. Un point de repère dans la ville qui se dévoile comme un
énigmatique message utopique et désespéré adressé à la collectivité.
Nous parlons ici bien du politique, non pas en termes d’engagement ou d’œuvres politisées, mais pour nommer des propositions artistiques qui s’inscrivent symboliquement dans cet espace intermédiaire, lieu de naissance du politique, comme le définit Hannah Arendt: «[…] l’homme est a-politique. La politique prend naissance dans »l’espace-qui-est-entre-les hommes«, donc dans quelque chose de fondamentalement »extérieur-à-l’«homme. Il n’existe donc pas une substance véritablement politique. La politique prend naissance dans l’espace intermédiaire et elle se constitue comme relation».***
Massimiliano Baldassarri, commissaire de l’exposition
—
*Le titre de l’exposition renvoie à l’intitulé d’un cours d’Hannah Arendt
«Du désert et des oasis», (un chapitre de conclusion possible), donné
à l’Université de Berkeley en 1955 et publié dans «Qu’est-ce que la
politique?» (Paris, Éditions du Seuil, 1995).
** «El Ingenioso Hidalgo Don Quijote de la Mancha», est présenté à
l’hôtel des postes au centre ville de Neuchâtel et ouvre l’exposition sur
l’espace public hors des lieux confinés du centre d’art.
***op.cit., p. 33.
can
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Centre d’Art Neuchâtel
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CH-2000 Neuchâtel
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Kommentare von Daniel Leutenegger